L’accès aux services liés à la santé mentale et à l’utilisation de substances demeure difficile au Canada

Le 2 août 2023 — Chaque année au Canada, environ 1 personne sur 5 aura un problème de santé mentaleReference1. Bon nombre de Canadiens doivent attendre avant de recevoir les soins dont ils ont besoin, et certains n’en reçoivent aucun ou pas assez. Les jeunes sont particulièrement touchés par le manque de servicesReference2. Les problèmes de santé mentale et d’utilisation de substances figuraient déjà parmi les principales causes d’invalidité  chez les adultes et les enfants quand la COVID-19 a chambardé nos vies et accentué l’isolement, le stress, la peur et la tristesse.

C’est dans ce contexte que le gouvernement du Canada, les provincesNote de bas de page i et les territoires ont convenu que l’accès rapide et équitable à des services de grande qualité en matière de santé mentale et d’utilisation de substances doit être une priorité partagée en santé. Dans la foulée, l’ICIS et des partenaires en matière de données ont été appelés à collaborer à la création et à la diffusion d’indicateurs visant à mesurer périodiquement les progrès réalisés.

La présente section porte sur les sujets suivants :

  • les services liés à la santé mentale et à l’utilisation de substances offerts aux jeunes de 12 à 25 ans;
  • la réponse aux besoins des Canadiens en matière de santé mentale;
  • le temps d’attente des Canadiens pour obtenir du counseling en santé mentale.

La facilité d’accès à des services appropriés, un enjeu majeur pour les jeunes

Les problèmes de santé mentale et d’utilisation de substances commencent souvent à l’adolescence, et 70 % des personnes atteintes d’une maladie mentale ressentent des symptômes pour la première fois avant l’âge de 18 ans. On estime que jusqu’à 20 % des enfants et des jeunes au Canada — soit environ 1,2 million de personnes — souffrent d’un trouble de santé mentaleReference4. Le fait de répondre aux besoins en santé mentale des enfants et des jeunes favorise leur santé et leur bien-être tout au long de leur vie.

Les services destinés aux jeunes sont souvent fragmentés, ce qui complique la navigation dans le système de soins. Puis, à l’âge de la majorité, les jeunes doivent se tourner vers les services pour adultes et ainsi recommencer la recherche de soins. Les services offerts ne sont pas adaptés à leur âge, ne répondent pas nécessairement à leurs besoins et peuvent présenter une longue attente.

L’approche de services intégrés pour les jeunes a été mise au point pour s’attaquer à des problèmes de longue date — des services limités, fragmentés et d’une qualité variable — qui empêchent les jeunes (de 12 à 25 ans) d’obtenir l’aide dont ils ont besoin. L’objectif est de rendre les services liés à la santé mentale et à l’utilisation de substances pour les jeunes plus faciles à trouver et à utiliser grâce à la centralisation des ressources.

La plupart des organismes du pays commencent tout juste à offrir des services intégrés pour les jeunes. Les soins fondés sur des mesures sont une composante essentielle de ces services. Les fournisseurs de services intégrés pour les jeunes comprennent qu’il est important de mesurer les résultats au moyen de systèmes de données partagés, d’outils d’évaluation communs et d’études de recherche. Bien que nous n’ayons pas encore suffisamment d’information pour diffuser les résultats de l’indicateur, nous vous présentons un aperçu des avantages liés aux services intégrés pour les jeunes :

  • Ces services sont facilement accessibles, inclusifs et adaptés aux jeunes, pour qui l’accès aux soins liés à la santé mentale et à l’utilisation de substances est habituellement difficile.
  • Les organismes qui offrent ces services travaillent de pair avec des partenaires communautaires pour proposer un éventail de ressources aux jeunes directement dans leur milieu, et allient le soutien à la santé mentale et à l’utilisation de substances, les soins de santé primaires et les services sociaux, tels que l’aide à l’emploi, au logement et à l’éducation.
  • Ces services sont planifiés en collaboration avec les jeunes et les membres de leur famille. Ils reposent sur des principes communs afin de répondre à la fois aux besoins des utilisateurs et des collectivités. 
  • Ces services sont répartis à l’échelle du pays pour aider les jeunes vulnérables. La plupart des provinces et territoires comptent au moins un programme de services intégrés pour les jeunes en activité ou dont la mise en œuvre est en cours. Certains programmes sont expressément conçus pour les collectivités autochtones et intègrent des méthodes de guérison et des pratiques culturelles traditionnelles. Il reste encore du travail à accomplir pour relever certains défis liés aux collectivités rurales, tels que les ressources humaines limitées.
  • Les organismes qui offrent ces services étudient les soins offerts et en mesurent les résultats pour améliorer les programmes en fonction des points forts, des points faibles et des lacunes à combler.

Programmes de services intégrés pour les jeunes au Canada (aperçu des données de 2023)

Cette infographie est décrite ci-dessous
Type et nombre de programmes de services intégrés pour les jeunes T.-N.-L. Î.-P.-É. N.-É. N.-B. Qc Ont. Man. Sask. Alb. C.-B.§ Yn T.N.-O. Nun. Canada
En activité 1 0 0 0 n.d. 22 6 1 1 15 0 1 0 47
En cours de mise en œuvre n.d. 0 1 3 n.d. 8 0 3 1 9 0 0 0 25

Remarques
n.d. : non disponible.

Le Québec ne participe pas à l’exercice de production de rapports conjoints découlant de l’énoncé de principes communs sur les priorités partagées en santé. Les résultats du Québec ne sont donc pas disponibles. Terre-Neuve-et-Labrador a amorcé la planification liée à cet indicateur. Aucune donnée n’est disponible en ce moment pour les programmes dont la mise en œuvre est en cours.

† La Saskatchewan compte au moins 3 programmes en cours de mise en œuvre.

‡ En Alberta, Kickstand est l’initiative pancanadienne de services intégrés pour les jeunes.

§ La Colombie-Britannique compte 15 programmes en activité, 14 offrant des services en personne et 1, des services virtuels.

Le type et le nombre de programmes de services intégrés pour les jeunes indiqués sur la carte ne représentent qu’un aperçu des programmes financés par les provinces et les territoires qui faisaient partie de réseaux provinciaux, territoriaux ou pancanadiens au moment de la préparation du présent rapport.

Sources
Représentants provinciaux, territoriaux et pancanadiens des réseaux de services intégrés pour les jeunes. 2023.

Certains Canadiens affirment que leurs besoins pour des services de santé mentale ne sont pas tous comblés

Selon une enquête réalisée en 2018, un peu plus de 14 % des Canadiens de 12 ans et plus ont indiqué avoir reçu un diagnostic du trouble de l’humeur ou de trouble anxieux (Québec exclu). Parmi eux :

  • Près de 8 % ont déclaré avoir eu besoin de soins de santé mentale au cours des 12 mois précédents, mais qu’ils n’en ont pas reçus;
  • Près de 20 % ont dit avoir reçu des soins de santé mentale au cours des 12 mois précédents, mais que ces soins n’avaient pas complètement répondu à leurs besoins.

Ainsi, plus du quart des Canadiens (Québec exclu) ayant reçu un diagnostic de trouble de l’humeur ou de trouble anxieux — soit plus de 851 000 personnes — ont déclaré en 2018 que leurs besoins en santé mentale n’avaient été que partiellement satisfaits au cours de l’année précédente. Les personnes souffrant d’un trouble de l’humeur ou d’un trouble anxieux sont 2 fois plus susceptibles d’avoir des besoins en santé mentale non satisfaits comparativement aux personnes atteintes d’autres problèmes de santé mentaleReference5. En l’absence de soins formels pour les problèmes de santé mentale, les symptômes risquent de s’aggraver.

Source
Statistique Canada. Totalisation spéciale basée sur l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes — composante annuelle (ESCC) de 2018. 2023.

Pourcentage de Canadiens ayant reçu un diagnostic de trouble de l’humeur ou de trouble anxieux et dont certains besoins connexes n’ont pas été satisfaits, par province, 2018

Cette infographie est décrite ci-dessous
T.-N.-L. Î.-P.-É. N.-É. N.-B. Qc Ont. Man. Sask. Alb. C.-B. Territoires Canada

6 % 
(1–10)

7 % 
(1–12)

10 % 
(6–15)

6 % 
(2–9)

n.d.

7 % 
(6–9)

8 % 
(4–11)

7 % 
(3–11)

9 % 
(6–11)

8 % 
(5–10)

n.d.

8 %
(7–9)

Remarques
n.d. : non disponible.

Le Québec ne participe pas à l’exercice de production de rapports conjoints découlant de l’énoncé de principes communs sur les priorités partagées en santé. Les résultats du Québec ne sont donc pas disponibles. Les résultats pour les territoires ne sont pas disponibles en raison de la couverture incomplète des données.

Pourcentage de Canadiens âgés de 12 ans et plus ayant déclaré avoir reçu un diagnostic de trouble de l’humeur ou de trouble anxieux et dont les besoins perçus en matière de santé mentale n’ont pas été comblés au cours des 12 mois précédents (Québec exclu).

Les soins de santé mentale comprennent l’information, les médicaments, les services de counseling et d’autres services.

Cet indicateur est basé sur les personnes qui ont indiqué avoir reçu un diagnostic de trouble de l’humeur ou de trouble anxieux. Les différences provinciales dans le taux de diagnostic ou les processus diagnostics pourraient avoir une incidence sur la comparabilité des résultats entre les provinces.

Les chiffres entre parenthèses indiquent une fourchette de valeurs possibles — l’intervalle de confiance — pour les estimations issues des données d’enquête. Cette fourchette tient compte de l’incertitude des estimations. Par exemple, une province peut avoir une large fourchette si le nombre de réponses à l’enquête est faible et que les résultats sont moins stables.

Source
Statistique Canada. Totalisation spéciale basée sur l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes — composante annuelle (ESCC) de 2018. 2023.
 

Ces résultats ne fournissent pas un portrait complet des besoins non satisfaits en matière de santé mentale. Selon des données plus récentes, à l’automne 2020, pendant la deuxième vague de la pandémie de COVID-19, près d’un Canadien sur 5 âgé de 12 ans et plus a déclaré avoir eu besoin de soins de mentale au cours de l’année précédente. Près de la moitié de ces personnes estimaient que leurs besoins avaient été partiellement satisfaits ou non satisfaits. Interrogés au sujet des obstacles à l’obtention de soins, les Canadiens ayant des besoins non satisfaits ont entre autres mentionné le manque de ressources financières et le manque de connaissances quant à l’endroit où obtenir de l’aide. Une personne sur 4 a dit préférer se débrouiller seuleReference6.

Les données ne permettent pas de connaître les conséquences des besoins non satisfaits ni d’en savoir davantage sur les personnes qui n’ont pas cherché à obtenir des soins de santé mentale. La pandémie a décuplé les besoins en santé mentale, mais elle a aussi amené de nouveaux modes de prestation des soins. Les vidéoconférences, les appels téléphoniques et même les messages texte pourraient avoir aidé certaines personnes à obtenir des soins et du soutien.

Il est très difficile actuellement partout au Canada d’avoir accès à des services psychologiques, qu’il s’agisse de psychologues, de travailleurs sociaux ou d’éducateurs spécialisés. Les listes d’attente sont longues et, vu l’augmentation de la détresse et des symptômes d’anxiété chez bon nombre de jeunes, il est urgent d’agir auprès de ce groupe d’âge. Les parents veulent savoir quoi faire pour aider leurs enfants.— Dr Nicholas Chadi, pédiatre au Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, Québec

La moitié des Canadiens ont accès à des services communautaires de counseling en moins d’un mois

L’accès rapide aux soins peut prévenir les visites au service d’urgence et les séjours à l’hôpital, et favoriser une meilleure santé mentale à long terme.

Remarque
Cet indicateur mesure le nombre médian de jours que les clients ont attendu avant de recevoir des services communautaires de counseling en santé mentale. Il inclut uniquement les services planifiés et financés par le secteur public.

Sources
Systèmes de collecte de données provinciaux et territoriaux, 2020.
 

Dans le cadre de leurs démarches pour faciliter l’accès à des services de santé mentale de qualité, les gouvernements doivent se poser les questions suivantes :

  • Les Canadiens ont-ils accès aux soins dont ils ont besoin?
  • Ont-ils accès aux soins assez rapidement?
  • Que pensent les Canadiens de leur expérience en matière d’accès aux soins?

Les temps d’attente pour des services communautaires de counseling en santé mentale variaient à l’échelle du pays, 2020

Cette infographie est décrite ci-dessous
T.-N.-L. Î.-P.-É. N.­É. N.-B. Qc Ont. Man. Sask. Alb. C.-B. Yn T.N.-O. Nun. Canada

33

n.d.

22

62

n.d.

n.d.

10

12

15

6 4 n.d.

22

Remarques
n.d. : non disponible. À l’heure actuelle, les données pour l’Île-du-Prince-Édouard, le Québec, l’Ontario et le Nunavut ne sont pas disponibles.

— Les résultats de l’Alberta ne sont pas présentés en raison d’une couverture incomplète des données, mais ils sont inclus dans le calcul de la valeur pour le Canada.

Nombre médian de jours d’attente pour l’obtention de services communautaires de counseling en santé mentale.

Inclut seulement les services financés par le secteur public qui sont planifiés à l’avance.

Les résultats de la Nouvelle-Écosse, du Manitoba, de la Saskatchewan, de la Colombie-Britannique et du Yukon reposent sur une couverture partielle des données.

Les données doivent être interprétées avec prudence. Elles proviennent de systèmes provinciaux et territoriaux indépendants qui s’appuient sur des définitions comptant des différences connues.

Sources
Systèmes de collecte de données provinciaux et territoriaux, 2020.
 

Dans certaines régions, les temps d’attente pour les services de counseling en santé mentale sont plus longs pour les enfants et les jeunes que pour les adultes (18 ans et plus). Les enfants et les jeunes représentent environ le tiers du volume total des demandes visant les services de counseling en santé mentaleReference7.

Nous savons que les provinces et les territoires n’ont pas les mêmes méthodes de prestation de services, de collecte de données et de déclaration des données. Plusieurs facteurs ont une incidence sur les temps d’attente pour l’obtention de services de counseling en santé mentale, dont :

  • le type de services offerts, ce qui comprend les différences entre les services financés par le secteur public et ceux dispensés par le secteur privé;
  • la facilité avec laquelle les personnes peuvent cheminer dans le système;
  • les facteurs communautaires et culturels qui ont une incidence sur les besoins en matière de soins;
  • les caractéristiques personnelles comme le niveau de revenu, le soutien social et familial, l’éducation et l’emplacement géographique;
  • la stigmatisation, qui peut dissuader une personne à demander de l’aide;
  • la mesure dans laquelle des soins sont nécessaires;
  • la disponibilité de la personne qui reçoit les services ou ses préférences pour la prise de rendez-vous.
C’est très long avant d’obtenir des services en santé mentale, même si vous êtes un jeune en crise depuis plusieurs mois. Environ 5 mois avant ma première hospitalisation, mon médecin de famille a dit à mes parents de m’emmener à l’hôpital en raison de la crise que je vivais. Mais même quand un jeune se pointe à l’urgence parce qu’il a des pensées suicidaires, on le renvoie à la maison sans lui offrir de soins; on le met simplement sur une liste d’attente. — Hannah, 19 ans, Ontario

Que devons-nous savoir de plus?

Pour des millions de Canadiens, il importe d’avoir un meilleur accès aux services liés à la santé mentale et à l’utilisation de substances. Bien que les défis soient nombreux au pays, on ne recueille pas de manière uniforme l’information sur la population touchée par le manque de services, le type de services disponibles et le type de personne qui obtient des soins ou qui n’en obtient pas. Pour améliorer l’accès à des ressources efficaces sur le plan de la santé mentale et de l’utilisation de substances, nous devons comprendre les besoins des différents groupes (notamment selon le sexe, le niveau de revenu, la langue et la race). Nous devons comprendre les obstacles et trouver la façon optimale d’organiser et d’offrir les soins.

Perspectives

C’est à plus long terme qu’il sera possible d’apporter les améliorations nécessaires et d’harmoniser les divers systèmes de données et mesures. L’ICIS tiendra les Canadiens au fait des progrès accomplis. Ce premier rapport offre un aperçu de l’information dont nous disposons dans chacun des 4 domaines prioritaires. Certaines données remontant à quelques années déjà, des provinces et territoires ont entretemps réalisé des avancées significatives, notamment en colligeant des données qui leur sont propres. Nous collaborerons donc étroitement avec nos partenaires en matière de données, de même qu’avec les provinces et territoires afin de peaufiner cet ensemble initial d’indicateurs, d’améliorer la comparabilité et de déterminer et d’élaborer de nouveaux indicateurs qui aideront à saisir les progrès réalisés au bénéfice des Canadiens.

Note de bas de page

i.
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Le Québec ne participe pas à l’exercice de production de rapports conjoints découlant de l’énoncé de principes communs sur les priorités partagées en santé.

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